Samedi 17 juillet 2010 à 2:40
Mercredi 9 juin 2010 à 20:47
L'ironie réside, quoiqu'il en soit, dans le fait que je sois parmi eux. Un jour, je balancerai le reste et mon PC et ce ne sera pas pour m'acheter un Mac.
Lundi 10 mai 2010 à 20:29
Je m'appelle Eugénie, et ceci n'est pas une plaisanterie.
Fin.
Mardi 27 avril 2010 à 21:56
« Au crépuscule, je sens les premiers fourmillements. Bientôt, les aiguilles cesseront de tourner. Pourtant, c’est l’envie d’exprimer mes dernières pensées, mon dernier vagabondage qui se fait la plus puissante. Je m’offre le plaisir d’exaucer cette envie, au lieu de supporter les mines sinistres, tristes et lasses dans l’attente d’une mort trop lente. A l’aube demain, on me trouvera, inerte, la main tenant toujours mon crayon.
La mort est une chose étrange. Il vient de surprenantes envies. Notamment, l’immédiate mienne est celle d'écrire. En regardant autour de moi, je vois posé les fleurs du mal sur la petite table en bois travaillé, Baudelaire… Mes jeunes années, les premières passions, l’intrigue dans laquelle ses poèmes me plongeaient. Il m’a éveillé, il m’endormira. Je flâne entre les pages des Fleurs du mal, à la recherche de je-ne-sais-quelles-réponses sur le néant qui va bientôt m’engloutir. J’ai envie de vomir. De fuir.
Je me suis assoupi, et j’ai fait un rêve singulier : on me retrouvait, et l’on me laissait là, sans égard, comme un chien mort de faim. Comme une bête jamais considérée. « Ah ! On ne peut plus se jouer de lui, laissons le donc là ». Et Baudelaire, qui me glace. Je ne suis qu’ « une charogne » en devenir.
Rappelez-vous l'objet que nous vîmes, mon âme,
Ce beau matin d'été si doux:
Au détour d'un sentier une charogne infâme
Sur un lit semé de cailloux,
Les jambes en l'air, comme une femme lubrique,
Brûlante et suant les poisons,
Ouvrait d'une façon nonchalante et cynique
Son ventre plein d'exhalaisons.
Le soleil rayonnait sur cette pourriture,
Comme afin de la cuire à point,
Et de rendre au centuple à la grande Nature
Tout ce qu'ensemble elle avait joint;
Et le ciel regardait la carcasse superbe
Comme une fleur s'épanouir.
La puanteur était si forte, que sur l'herbe
Vous crûtes vous évanouir.
Les mouches bourdonnaient sur ce ventre putride,
D'où sortaient de noirs bataillons
De larves, qui coulaient comme un épais liquide
Le long de ces vivants haillons.
Tout cela descendait, montait comme une vague,
Ou s'élançait en pétillant ;
On eût dit que le corps, enflé d'un souffle vague,
Vivait en se multipliant.
Et ce monde rendait une étrange musique,
Comme l'eau courante et le vent,
Ou le grain qu'un vanneur d'un mouvement rythmique
Agite et tourne dans son van.
Les formes s'effaçaient et n'étaient-plus qu'un rêve,
Une ébauche lente à venir,
Sur la toile oubliée, et que l'artiste achève
Seulement par le souvenir.
Derrière les rochers une chienne inquiète
Nous regardait d'un œil fâché,
Épiant le moment de reprendre au squelette
Le morceau qu'elle avait lâché.
Et pourtant vous serez semblable à cette ordure,
A cette horrible infection, Étoile de mes yeux, soleil de ma nature,
Vous, mon ange et ma passion !
Oui ! Telle vous serez, ô la reine des grâces,
Après les derniers sacrements,
Quand vous irez, sous l'herbe et les floraisons grasses.
Moisir parmi les ossements.
Alors, ô ma beauté ! Dites à la vermine
Qui vous mangera de baisers
Que j'ai gardé la forme et l'essence divine
De mes amours décomposés !
Un jour il y a longtemps, j’avais senti la mort. Ce qu’elle serait pour moi, je l’avais senti me prendre tout en entier, comme un avant goût du destin de chaque homme. L'angoisse m’avait alors envahit. Avec le temps, j’étais devenu un curieux, un curieux qui s’ennuyait. Ce soir, quelque chose de nouveau s’approche. La dernière découverte. Une apothéose. Peut-être.
Connais-tu, comme moi, la douleur savoureuse,
Et de toi fais-tu dire: « Oh ! L’homme singulier ! »
-J'allais mourir. C'était dans mon âme amoureuse,
Désir mêlé d'horreur, un mal particulier ;
Angoisse et vif espoir, sans humeur factieuse.
Plus allait se vidant le fatal sablier,
Plus ma torture était âpre et délicieuse ;
Tout mon cœur s'arrachait au monde familier.
J'étais comme l'enfant avide du spectacle,
Haïssant le rideau comme on hait un obstacle...
Enfin la vérité froide se révéla:
J'étais mort sans surprise, et la terrible aurore
M'enveloppait. -Eh quoi ! N’est-ce donc que cela ?
La toile était levée et j'attendais encore.
[Le rêve d'un curieux]
Tout est atrocement calme, mes jambes ne me répondent plus. Mon corps s’ancre dans ce silence, il lui fait l’amour, et mon âme hurle à la tromperie comme une innocente amoureuse éplorée. Je ne crois en rien. L’espoir n’existe plus ici et maintenant. Je vais mourir. Mais qu’est ce que cela peut bien vouloir dire ? M-O-U-R-I-R, verbe surprenant lorsqu’on l’observe. Mou et rire. On pourrait presque en faire une plaisanterie.
Quand j’y réfléchis je me rends compte qu’il n’y a pas d’action de mourir, c'est une extravagance de la langue française. Je meurs, non. Jamais. Il y a l'avant et l'après. La vie et la mort. Mais on ne meurt jamais.
Il m'était arrivé, plus jeune et inconscient de vouloir toucher à l'absolu du néant, de penser que j'étais autre, que je ne pouvais m'inscrire dans ce monde, je ne pouvais être fait de la même pâte que les vulgaires que je côtoyais chaque jour. Mais, il s'agissait de simagrées, de caprices d'un jeune homme romantique et passionné, épris de poésie qui interprétait tout ce qui lui passait sous les yeux. Une façon de se compliquer l'existence, par orgueil et par vanité. Cette nuit, alors que l'aube approche, le goût véritable, pur et absolu du néant me pénètre.
Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte,
L'Espoir, dont l'éperon attisait ton ardeur,
Ne veut plus t'enfourcher ! Couche-toi sans pudeur,
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle bute.
Résigne-toi, mon cœur; dors ton sommeil de brute.
Esprit vaincu, fourbu! Pour toi, vieux maraudeur,
L'amour n'a plus de goût, non plus que la dispute;
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !
Plaisirs, ne tentez plus un cœur sombre et boudeur !
Le Printemps adorable a perdu son odeur !
Et le Temps m'engloutit minute par minute,
Comme la neige immense un corps pris de roideur ;
Je contemple d'en haut le globe en sa rondeur,
Et je n'y cherche plus l'abri d'une cahute.
Avalanche, veux-tu m'emporter dans ta chute ?
Ce qu'il y a de pathétique dans ses pensées que je couche pour un hypothétique lecteur, c'est qu'elles sont tristes à crever. Au fond, je crois que l'euphorie serait un sentiment approprié face à la mort. Elle est une délivrance pour le solitaire et le torturé, un commencement pour le spirituel. Il n'y a que les médiocres pour être effrayés par la mort. Je voulais, je veux être Le mort Joyeux que dépeint Baudelaire.
Dans une terre grasse et pleine d'escargots
Je veux creuser moi-même une fosse profonde,
Où je puisse à loisir étaler mes vieux os
Et dormir dans l'oubli comme un requin dans l'onde,
Je hais les testaments et je hais les tombeaux ;
Plutôt que d'implorer une larme du monde,
Vivant, j'aimerais mieux inviter les corbeaux
A saigner tous les bouts de ma carcasse immonde.
Ô vers ! noirs compagnons sans oreille et sans yeux,
Voyez venir à vous un mort libre et joyeux ;
Philosophes viveurs, fils de la pourriture,
A travers ma ruine allez donc sans remords,
Et dites-moi s'il est encore quelque torture
Pour ce vieux corps sans âme et mort parmi les morts !
Il m'avait toujours semblé que la vie était semblable à une maîtresse qui au petit matin vous quittait. On veut la retenir, se réfugier dans ses jupons, l'embrasser, être à nouveau en elle, mais elle s'éclipse, d'un sourire voluptueux. Ne laissant derrière elle que l'odeur de l'amour, comme la vie laisse celle de la mort.
Viens sur mon cœur, âme cruelle et sourde,
Tigre adoré, monstre aux airs indolents ;
Je veux longtemps plonger mes doigts tremblants
Dans l'épaisseur de ta crinière lourde ;
Dans tes jupons remplis de ton parfum
Ensevelir ma tête endolorie,
Et respirer, comme une fleur flétrie,
Le doux relent de mon amour défunt.
Je veux dormir ! dormir plutôt que vivre !
Dans un sommeil, douteux comme la mort,
J'étalerai mes baisers sans remord
Sur ton beau corps poli comme le cuivre.
Pour engloutir mes sanglots apaisés -
Rien ne me vaut l'abîme de ta couche ;
L'oubli puissant habite sur ta bouche,
Et le Léthé coule dans tes baisers.
A mon destin, désormais mon délice,
J'obéirai comme un prédestiné ;
Martyr docile, innocent condamné,
Dont la ferveur attise le supplice,
Je sucerai, pour noyer ma rancœur,
Le népenthès et la bonne ciguë
Aux bouts charmants de cette gorge aiguë
Qui n'a jamais emprisonné de cœur.
Je me sens partir à la dérive. Je délire. Je ne laisserai à la vie qu'une femme, j'ignore si elle portera le deuil, si un jeune homme la croisera au détour d'un boulevard et aura pour elle le regard impliqué, fasciné qu'il leur portait. Il est vrai que les veuves sont fantasmagoriques et énigmatiques. Elles portent la mort. Paradoxalement, elles vivent la mort. Elles sont sa représentation pour les vivants. Des allégories de l'absence, des ombres. A la fois fascinantes et inaperçue.
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?
Ailleurs, bien loin d'ici ! Trop tard ! Jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !
[A une passante]
Agnès ! Amour, prend moi à la mort, toi qui m’a donné la vie !
Nous aurons des lits pleins d'odeurs légères,
Des divans profonds comme des tombeaux,
Et d'étranges fleurs sur des étagères,
Ecloses pour nous sous des cieux plus beaux.
Usant à l'envi leurs chaleurs dernières,
Nos deux coeurs seront deux vastes flambeaux,
Qui réfléchiront leurs doubles lumières
Dans nos deux esprits, ces miroirs jumeaux.
Un soir fait de rose et de bleu mystique,
Nous échangerons un éclair unique,
Comme un long sanglot, tout chargé d'adieux;
Et plus tard un Ange, entr'ouvrant les portes,
Viendra ranimer, fidèle et joyeux,
Les miroirs ternis et les flammes mortes.
[la mort des amants]
Je tergiverse et me perds. La mort est une délivrance, longtemps elle m'a poussée à vivre pleinement et sans peur. Je savais que mon supplice s'achèverait. Cette nuit, alors qu'elle dépose son voile sur moi, je suis incohérent. Apeuré et impatient. Qu’importe. Ma curiosité sera bientôt satisfaite, mes angoisses apaisées, mon existence perdra sa vanité dans son achèvement. Ma mort est celle d'un pauvre.
C'est la Mort qui console, hélas ! et qui fait vivre ;
C'est le but de la vie, et c'est le seul espoir
Qui, comme un élixir, nous monte et nous enivre,
Et nous donne le cœur de marcher jusqu'au soir ;
A travers la tempête, et la neige, et le givre,
C'est la clarté vibrante à notre horizon noir ;
C'est l'auberge fameuse inscrite sur le livre,
Où l'on pourra manger, et dormir, et s'asseoir ;
C'est un Ange qui tient dans ses doigts magnétiques
Le sommeil et le don des rêves extatiques,
Et qui refait le lit des gens pauvres et nus ;
C'est la gloire des Dieux, c'est le grenier mystique,
C'est la bourse du pauvre et sa patrie antique,
C'est le portique ouvert sur les Cieux inconnus !
Les artistes idéalisent la mort. Je n'ai jamais été un artiste.
Combien faut-il de fois secouer mes grelots
Et baiser ton front bas, morne caricature ?
Pour piquer dans le but, de mystique nature,
Combien, ô mon carquois, perdre de javelots ?
Nous userons notre âme en de subtils complots,
Et nous démolirons mainte lourde armature,
Avant de contempler la grande Créature
Dont l'infernal désir nous remplit de sanglots !
Il en est qui jamais n'ont connu leur Idole,
Et ces sculpteurs damnés et marqués d'un affront,
Qui vont se martelant la poitrine et le front,
N'ont qu'un espoir, étrange et sombre Capitole !
C'est que la Mort, planant comme un soleil nouveau,
Fera s'épanouir les fleurs de leur cerveau !
[la mort des artistes]
Tout est terminé, ma vie s’achève à l’aube, tant mieux. Pied de nez aux allégories habituelles, pied de nez à Baudelaire. « La fin de la journée » accompagnera la fin de ma nuit. »
Sous une lumière blafarde
Court, danse et se tord sans raison
La Vie, impudente et criarde.
Aussi, sitôt qu'à l'horizon
La nuit voluptueuse monte,
Apaisant tout, même la faim,
Effaçant tout, même la honte,
Le Poète se dit : " Enfin !
Mon esprit, comme mes vertèbres,
Invoque ardemment le repos ;
Le cœur plein de songes funèbres,
Je vais me coucher sur le dos
Et me rouler dans vos rideaux,
Ô rafraîchissantes ténèbres ! "
Samedi 23 janvier 2010 à 21:29
Les feux s'allument enfin dans la petite salle, j'attends. Les acteurs apparaissent un à un. Ils sont quelconques, des hommes et des femmes comme les autres, sans rôle particulier que celui d'être ce qu'ils sont. Cette fois ci sera différente, je le sais déjà. La pièce commence, ils s'agitent, vont de quiproquos en scènes inutilement tragiques. Ils dramatisent alors qu'en fait, il suffirait que l'un deux monte sur une chaise pour tout expliciter. Exaspération.
(Noir)
Je me réveille dans un lit à l'odeur de parfum bon marché, les draps sont doux, fraichement lavés. La précision avec laquelle l'odeur s'impose me surprend. Je n'ai pas encore ouvert les yeux. Je ne sais pas pourquoi. Habituellement, le réveil est accompagné de cet automatisme. Je crois que je ne suis pas chez moi, ou qu'on a dormi avec moi. Je ne me souviens que de cet étrange pièce de théâtre. Il fait chaud. Les yeux toujours clos, je repousse le drap. Maintenant, c'est une odeur de démaquillant qui emplie mes narines.
(Noir)
Je balance les clés sur la table. Demain matin, je passerai encore dix minutes à les chercher au milieu de tout ce que j'entasse dans mon minuscule havre. Alain est là, endormi. Ces derniers temps il reste le soir et s'en va avant l'aube. Il me manque quand il dort. Bizarrement, même quand il s'en va ça ne me fait pas cette effet, le voir là, étendu, abandonné me rend jalouse et insignifiante. J'émerge. Je suis à le regarder depuis dix bonnes minutes, à penser des conneries.
(Noir)
Je hurle à ce qui semble être une none " Allez au Diable, vous et votre âne, je ne partirai pas aujourd'hui !". Je crois reconnaître Musset. Je m'en vais apparemment fâchée.
(Noir)
" J'en sais rien. Que veux tu que je te dise. Ouais, je t'aime ". La porte a claqué. Je m'assois, et commence à travailler, en songeant à la surprise que j'avais concocté pour le soir. Un porte-jartelle noir, brodé, trouvé par hasard et payé une fortune. Mais ces petites choses lui font plaisir, et cette manière délicate qu'il a de me les retirer m'excite. Je bourre ma pipe, j'ai l'oeil lubrique. Cependant, je sais qu'avant de passer à la jouissance, il faudra comprendre.
(Noir)